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Boire et Manger, quelle histoire !
Le blog d'une historienne de l'alimentation

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La cuisine, le lieu où l’on cuisine

Ce n’est pas par hasard que les livres de cuisine commencent à se répandre à partir du 17ème siècle. Jusqu’au XVIème, les progrès techniques ne sont pas tels qu’ils puissent modifier grandement les manières de cuisiner, mais à partir du XVIIème les changements de modes de cuisson associés à de nouvelles aspirations culinaires et l’utilisation de nouveaux produits vont changer l’art culinaire de façon définitive et profonde.
Dans les villes et les campagnes, chez les plus pauvres rien ne change vraiment, mais dans les classes plus aisées et le plus souvent urbaines, on assiste à de profonds bouleversements. La cuisine devient une pièce à part : le lieu où l’on prépare à manger. Ce qui existait dans les demeures aristocratiques et de la grande bourgeoisie tend à se démocratiser peu à peu vers les classes bourgeoises moins riches. Il ne faut cependant pas perdre de vue que jusqu’à l’arrivée du chauffage central, la cuisine reste la pièce à vivre dans beaucoup de maisons.
Le cuivre et la terre cuite restent les matières de prédilection pour cuisiner. On se transmet de mère en fille des grosses pièces de la batterie de cuisine fabriquées en cuivre étamé et très solides : bassines à confitures, casseroles, tourtières, turbotières et poissonnières.

Une évolution rapide

Le fer blanc fut inventé au début du 18ème siècle, et cela permit de créer de nombre d’ustensiles pour des usages bien définis, de plus petite taille, adaptés aux nouveaux modes de cuisson, meilleur marché que le cuivre donc accessibles pour toutes les cuisinières. Mais les récipients en cuivre étamé restent les privilégies des cuisiniers.  La casserole à fond plat est un élément nouveau dans les cuisines parfaitement adaptée aux fourneaux il est l’héritier à la fois  du caquerole et des grandes cuillers médiévales, de même que les poêles à fricasser.

Potager du château des Bories, Antonne et Trigonat, Dordogne

La grande innovation est la création du potager, sorte de fourneau en maçonnerie recouverte de carreaux de faïence, percé d’ouvertures protégées par une grille amovible au fond desquelles brûlait un feu de bois ou de charbon de bois. Cela permit, outre le fait de cuisiner plus confortablement, à bonne hauteur sans se casser le dos, de pouvoir faire cuire avec des chaleurs différentes et de varier les préparations. Cela eut une influence majeure sur les préparations culinaires, en permettant de cuire séparément les aliments, on pouvait enfin cuire les légumes directement  dans une casserole dans leur jus et faire réduire les sauces préparer les roux et les coulis, et les viandes dans les poêles et ne pas leur faire subir la même cuisson. Et on pouvait enfin spécialiser les tâches puisque dans les immenses cuisines des châteaux, on pouvait construire plusieurs potagers.
Evidement c’est nouvelle façon de cuisiner vont peu à peu mettre le mortier au rang de pièce de musée.
La cheminée, surélevée pour être à hauteur d’homme,  était conservée pour le rôtissage et les cuissons à la broche rotative animée par un aide de cuisine ou par un mécanisme compliqué.
Dans les cuisines des maisons aristocratiques, l’abandon du sucre dans la cuisine pour n’être plus l’ingrédient que de la pâtisserie et confiserie entraine la séparation de l’office réservé au travail du sucre de la cuisine proprement dite.   
Le potager est l’ancêtre de la cuisinière portative en fonte inventée pendant la révolution française Par un mécanicien lorrain de génie qui avait conçu déjà auparavant le tournebroche mécanique dont peut encore admirer quelques spécimens dans certaines demeures.

Château de Roquetaillade, XIXème, fourneau central à bois, au fond cuisinière à charbon.

L’eau tirée de la fontaine ou du puits n’est plus conservée dans des baquets mais dans des réservoirs d’eau  nommés fontaines en étain, cuivre, faïence ou porcelaine munies d’un robinet qui allient l’utile à l’esthétique, car de nombreux artistes et artisans rivaliseront de talent pour créer des fontaines extrêmement belles dont des exemplaires sont encore conservées, et pas seulement dans des musées.
Cela faisait déjà longtemps que l’on conservait le vin dans des bouteilles, mais on vit apparaitre au 18ème siècle le bouchon de liège qui remplace l’étoupe et par conséquent le tire-bouchon qui va remporta très vif un beau succès et dont les fabrications rivalisèrent d’originalité et d’esthétisme.
Dans les grandes maisons, l’abandon du sucre dans les plats entraina la création de l’office spécialement dévolu à la pâtisserie et à la confiserie, habitude qui continuera dans les restaurants qui apparaissent après la Révolution française
  

Et le modernisme entre dans la cuisine

Le 19ème siècle voit la continuation de la modernisation du matériel de cuisine alors que la pièce est reléguée dans les appartements bourgeois au fond de l’appartement, elle est assez peu confortable et souvent contiguë d’un réduit qui sert de chambre à la cuisinière.
Les ustensiles en aluminium furent plus faciles à entretenir, de même que les revêtements. Avec l’arrivée de l’eau courante et du gaz de ville, les tâches furent simplifiées et l’hygiène y gagna : plus besoin d’aller puiser l’eau et de la conserver dans des fontaines, il suffit de tourner un robinet pour avoir de l’eau potable et les tuyaux d’évacuation entrainent les eaux usées directement dans le tout à l’égout. Les brûleurs apparurent sur les cuisinières au gaz.



Le 20ème siècle est celui de la fée électricité qui s’installe dans les maisons des villes puis des campagnes. Peu à peu le matériel de cuisine s’électrifia et les nouveautés apparurent peu à peu. L’invention du réfrigérateur permit de mieux conserver les aliments, les cuisinières électriques concurrencèrent celles au gaz et peu à peu la cuisinière se divisa : des plaques de cuisson d’un côté et des fours encastrables de l’autre. Puis arrivèrent les congélateurs et les micro-ondes, les lave-vaisselle, les cafetières, bouilloires, grille-pains, les robots ménagers électriques. Depuis quelques décennies, la cuisine redevient une pièce à vivre où l’on prend ses repas. Le rangement est à la fois rationnel et esthétique : c’est le règne de la cuisine intégrée. Paradoxalement au moment où les femmes cuisinent de moins en moins.


Mots-clés : Technorati

le 12.06.08 à 12:16 dans Arts de la table
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