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Boire et Manger, quelle histoire !
Le blog d'une historienne de l'alimentation

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l'agriculture en question

« Comment le blé a piégé l’humanité »: tel est le titre d’un article de James Scott, anthropologue, lu il y a quelques temps et qui me suggère quelques réflexions.

Le propos est le suivant : le blé a ouvert la voie à l’apparition d’un pouvoir centralisé. Partant de l’idée que l’agriculture des premiers états organisés utilisait une importante main d’œuvre servile donc a permis la naissance d’une machine d’Etat et d’une élite qui commandait à tous, on assite chez certains historiens et anthropologues à une remise en cause de l’agriculture : Si elle avait été la cause de tous nos maux ?
Je pose la question : est-ce l’agriculture la cause de tous les maux ou le goût du pouvoir et du lucre propre à l’espèce humaine ? Et cette hiérarchisation sociale, qui s’est réalisée à une époque quand l’agriculture était la seule activité sociale et organisée au sein de communautés, fut voulue par les hommes dans une volonté de pouvoir. Il n’y a qu’à lire les récits fondateurs des différentes communautés humaines à travers le monde.
Car l’agriculture apparut très vite comme une nécessité à des populations de cueilleurs-chasseurs qui pratiquaient déjà une forme d’agriculture, parce que manger était indispensable à leur survie. Puis l’agriculture a fourni un bien de première nécessité: la nourriture et a permis aux hommes d’inventer une foule d’outils, de les perfectionner pour travailler mieux et moins douloureusement. Les hommes ont également amélioré sans cesse les variétés naturelles afin de les rendre meilleures tant sur le plan nutritionnel qu’organoleptiques. Doit-on leur en faire le reproche ?
Et si, à partir cette première organisation spatiale et sociale, se sont développées des pratiques néfastes ce n’est pas la faute de l’agriculture mais celle d’un appétit sans cesse grandissant des hommes. En effet, ce n’est pas l’agriculture qui a donné naissance à des pratiques et des techniques intensives mais le désir humain de produire toujours plus et de faire toujours plus de profit. L’agriculture n’a pas créée l’esclavage qui participait dans l’Antiquité d’un système social qui a favorisé la possibilité de produire à moindre coût, même si des économistes ont démontré que l’esclavage n’est pas plus rentable que la main d’œuvre rémunérée. Et d'ailleurs actuellement les agriculteurs ne sont -ils pas devenus sinon les esclaves, du moins sous la contrainte des centrales d'achat?
Ce ne sont pas les agriculteurs qui sont l’origine de l’utilisation d’intrants chimiques et de semences stériles due aux désirs des industries de recycler leurs armes chimiques ou de garder les paysans sous contrôle, méthodes néfastes autant à la nature qu’aux hommes, pas plus qu’ils ne sont responsables d’une mécanisation à outrance.
Attribuons plutôt la faute à ces industriels et aux gouvernements qui les ont laissé faire et qui ont souvent poussé les agriculteurs, par des biais pas toujours honnêtes à mettre en place et pratiquer ce type de culture qui a entrainé la disparition des haies (que l’on pousse à replanter actuellement), le lessivage des sols, l’endettement et le suicide des nombres d’agriculteurs (en France et ailleurs dans le monde), la construction de fermes folles de milliers d’animaux élevés hors sol qui ne broutent jamais une herbe et ne piétinent jamais une prairie.
Qui nous pousse à manger des fruits et légumes qui n’ont connu ni le soleil, ni la terre ? Pas les paysans mais une politique agricole qui au nom du "toujours plus" et "oujours moins cher" a poussé des agriculteurs à devenir des exploitants agricoles.
Ce fut d’abord à la demande d’une population urbaine toujours plus nombreuse et qui demandait toujours davantage de nourriture que les agriculteurs produisirent plus et modifièrent les pratiques agricoles.
Il semble que le problème est considéré dans le mauvais sens en faisant fi de la nécessité permanente des paysans de moins en moins nombreux de nourrir une population sans cesse croissante et qui doivent faire face à des politiques agricoles ineptes souvent, au réchauffement climatique, à une météo de plus en plus capricieuse, aux augmentations du prix des matières premières et à des demandes changeantes et croissantes.
Je ne pense pas que le blé, pas plus que la vigne, le riz ou le maïs ont piégé l’humanité, allons chercher du côté de la vanité humaine, de batailles d’égo, de désirs de pouvoir.
Mots-clés : Technorati

le 24.04.22 à 17:23 dans Coup de gueule- Coup de coeur
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Commentaires

Très sympa

 Article très intéressant à lire, merci pour ce partage !

Choucha - 25.07.24 à 09:44 - # - Répondre -

Merci

 J'ai adoré vous lire


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Choucha - 25.07.24 à 10:04 - # - Répondre -

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