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Boire et Manger, quelle histoire !
Le blog d'une historienne de l'alimentation

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Bouillon KUB

Le petit KUB OR est dans tous les placards des ménagères avisées. Bouillon KUB est devenu un nom commun du vocabulaire français à tel point que dans certaines recettes on ne lit plus :1 litre du bouillon de viande mais 2 cubes de bouillon Maggi.


 
 Naissance du Bouillon KUB

1907 apparaissent des grandes plaques émaillées qui se voyaient de loin sur lesquelles on pouvait lire : Bouillon KUB. Publicité pour rappeler aux ménagères qu’elles pensent à acheter du bouillon concentré de viande Kub, dernier-né des sociétés Maggi.

Judicieusement placées sur les devantures des épiceries ou à proximité de ces dernières, elles complétaient des encarts publicitaires papier. Les ménagères ne pouvaient résister à l’argument économique qui renforçait ce message : «  10 centimes pour un litre de bouillon », argument imparable pour toute mère de famille soucieuse des finances familiales.

La publicité était forte en France, pays où la résistance aux produits alimentaires industriels était importante et où l’on ne concevait pas une bonne table sans produits frais.

Le bouillon de viande concentré provoqua des réactions envers une préparation qui remplaçait les parties de viandes qui se dissolvent dans l’eau, qui font « le mérite des bons potages, qui en se caramélisant, forment le roux des viandes et qui permettent le rissolé des rôtis » (Brillat Savarin) par un produit industriel dans lequel on a pu incorporer n’importe quoi !

Auparavant, en 1889, le jury de l’Exposition universelle classait l’extrait de viande Maggi « hors concours » pour ses petits bâtonnets qualifiés de « comble de l’art culinaire ».

En 1900, la tasse de bouillon chaud à base d’extrait de viande avait connu un succès phénoménal pendant l’Exposition Universelle. Le fournisseur de l’armée française en offrait à tous les visiteurs pour montrer que c’était le seul procédé qui conservait le goût de la viande fraîche.

 

Qui en était le génial inventeur ?

Julius Maggi, fils d’un minotier suisse, avait pris la direction des moulins paternels à Kempal, prés du lac de Constance en 1866. Observateur des mœurs de son temps, il prit assez vite conscience que les femmes qui travaillaient, et elles étaient de plus en plus nombreuses,  passaient moins de temps dans leur cuisine (malin le gars !) Il réfléchit à concevoir un produit qui aide la ménagère à mieux gérer son temps.

Il se tourne, en premier lieu, vers les farines de pois et de haricot qui cuisent plus rapidement que les pois et haricots secs. Le résultat de ces cogitations fut une excellente soupe à base de farine de légumineuses Maggi, rapide à faire qui permet aux femmes de ne plus passer des heures à cuisiner la soupe du soir. Ces potages étaient présentés en rouleaux compacts, prêts à cuire. Il ouvre un dépôt à Paris où l’on peut trouver ses potages en rouleaux et fait appel à la « réclame » pour les promouvoir, car les résistances à cette nouveauté étaient toujours présente. Il falait convaincre !

Ce cher Julius pousse sa réflexion plus loin : pour faire de la bonne soupe, il faut du bœuf ou du poulet, ce qui le conduit à s’intéresser aux extraits de viande. Il  modifie les proportions des ingrédients, y incorpore des herbes et aromates et invente l’Arôme Maggi qui facilite la sécrétion gastrique et dont « quelques gouttes suffisent pour donner un goût exquis à tous les mets » d’après son inventeur et la réclame.

A la Belle Epoque : tubes de consommé Maggi, soupe de pois au lard et le Potage à la fermière. Le Bouillon granulé Maggi est doublé par le bouillon Kub, en attendant la Poule au pot.

 

La concurrence copie : preuve du succès

La concurrence s’empare du succès : la marque allemande Bouillons Oxo qui publie un livre de recette comme support au produit. Une société belge qui exploite les brevets Liebig lance en France le Viandox en boisson, puis en cube. Un allemand, Karl Heinrich Knorr s’intéresse à ce marché et crée les soupes concentrées Knorr.

Mais toujours la même résistance en France et la même objection, pas de bonne cuisine sans produits frais !.

Arrive Première Guerre Mondiale, les sentiments antiallemands sont forts et la consonance germanique du mot Kub avec un K fut le prétexte pour bouder et même saccager la boutique de Maggi alors que l’armée française lui commandait du Bouillon Kub pour nourrir les soldats au front J !

 

Pour convaincre, on fait appel à la caution des plus grands chefs, en l’occurrence Escoffier qui dans « Le Guide de la bonne Cuisinière » recueil d’anciennes et nouvelles recettes utilisant le Bouillon Kub dit : «  dans ma longue carrière de chef de cuisine, j’ai eu à examiner différents produits à base d’extraits de viande utilisés en cuisine pour économiser le temps de préparation des aliments, tout en développant leurs qualités savoureuses. Je tiens à attester que le Bouillon Kub peut se placer au premier rang. »

Succès n’est pas complet et Maggi récidive

En 1925 « La bonne Cuisine pour tous » dans lequel sont prônés les usages du Bouillon Kub et de la Poule au pot, consommé de poule d’une « finesse incomparable » dixit le même Escoffier. 

 

Jamais Julius Maggi, mort en 1912, n’aurait pu imaginer un tel hommage à ces inventions qui allaient révolutionner les pratiques culinaires du monde entier !



Mots-clés : Technorati

le 08.06.09 à 09:00 dans Lexique Culinaire
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Commentaires

bouillon et glutamate

Merci Ségolène pour ce petit historique, mais l'histoire continue. Et l'arrivée du glutamate, exhausteur de goût, dans l'agro alimentaire a sa part à jouer dans le domaine économique (économie de coût en ingrédient) et également sur notre santé. Le glutamate monosodique est bien souvent ajouter aux extraits de levure et là l'histoire est beaucoup moins drôle pour notre santé, les connections synaptiques prennent un sacré coup ! Je vous laisse découvrir quelques infos sur ce lien : http://dieteticanaturo.over-blog.com/article-24255228.html
Personnellement je fuis comme la peste tous ces cubes, à vous de choisir.

Anne-Laure - 09.06.09 à 12:32 - # - Répondre -

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