S'identifier - S'inscrire - Contact

Boire et Manger, quelle histoire !
Le blog d'une historienne de l'alimentation

Recherche

 

Transmission des savoir-faire culinaires

C’était le sujet de l’émission “de Bouche à Oreille” de dimanche dernier sur France Culture. J’avais enregistré auparavant en studio, et comme, tenant compte du nombre d’invités, de nombreux mixages et coupes ont été faites, j’écris aujourd’hui de ce qu’avais dit ce jour-là.

Lorsque l’on interroge des chefs sur l’origine de leur vocation professionnelle, dans la majorité des cas ils répondent : « la cuisine de ma mère » ou « la cuisine de ma grand-mère ». Parfois du grand-père et dans ce cas la transmission des savoir-faire inclut aussi la cueillette des champignons, la chasse ou la pêche, voire la connaissance du potager.
Ce qui est vrai pour les professionnels l’est aussi pour tout amateur. Notre goût pour la cuisine, notre curiosité pour la nourriture nous viennent avant toute chose d’habitudes et de préférences familiales. C’est dans les cuisines que se transmettent certains secrets  de famille, culinaires avant tout et le souvenir gustatif des plats.
 

La transmission orale du savoir-faire
A la femme a toujours été dévolue la lourde tâche de nourrir sa famille. D’abord son mari, puis l’enfant au sein,  ses enfants, voire parents et parentèle. Aux temps très anciens, ce sont elles qui partaient, dans les forêts et les champs, cueillir fruits et baies sauvages, herbes et racines, champignons comestibles et glaner les grains de céréales. Au sein de la communauté, leur revenaient les tâches d’écraser les grains, de pétrir les pains, de cuire les herbes potagères et racines. Pour toutes ces tâches, elles obtenaient l’aide des plus jeunes filles et des enfants qui n’étaient pas en âge d’accompagner les hommes à la chasse qui apprenaient ainsi à reconnaitre les aliments sauvages comestibles, à parfois les acclimater, à se servir des meules et pilons, à pétrir et à cuisiner ensemble divers ingrédients.
Lorsque les populations se sédentarisèrent, le potager remplaça avantageusement la vaste campagne, les femmes, aidées des enfants et des parents plus âgés, entretiennent poulaillers et clapiers, cultivent le potager et le verger dont elles tirent l’essentiel de la nourriture qui vient améliorer les céréales, base de l’alimentation. Ce travail quotidien se fait en famille, le plus souvent entre femmes qui étaient cantonnées dans les maisons et les jardins à la fois par sécurité et parce que les travaux des champs étaient souvent trop durs pour elles.
C’est ainsi que peu à peu se met en place des préparations ordinaires selon des modes propres à  chaque groupe social ou familial comme les fameuses soupes quotidiennes pour lesquelles il fallait déployer des trésors d’imagination afin de les améliorer et de les varier. Il y avait aussi des moments privilégiés de travail culinaire communautaire : préparer le cochon en hiver durant les grands froids, cuisiner les repas de moissons, de battages et de vendanges, les fêtes familiales ou religieuses, toutes étaient l’occasion de cuisiner ensemble et d’apprendre à d’autres et auprès d’autres des savoir-faire. De la sorte naquit un vaste patrimoine culinaire particulier à des pays, des régions, des catégories sociales et religieuses car la religion a eu une influence considérable sur le choix des aliments et les manières de les cuisiner qui utilisent les ressources locales. Il était indispensable pour les filles qui allaient se marier de savoir quels étaient les aliments autorisés et comment les cuisiner en respectant les interdits et les tabous. Et aussi quand les préparer car à chaque fête  correspondait  un  plat. Ceci était particulièrement strict dans les religions juive et musulmane. Et dans les religions chrétiennes, il y avait une cuisine spéciale pour les temps de jeûne. Les jeunes femmes apprenaient de cette manière quels étaient leurs goûts profonds en cuisine, cet apprentissage est également un vecteur de sensorialité et une manière de réguler l’appétit en sachant mieux ressentir les goûts.  
C’est une tradition orale, par observation et imitation qui permet aux filles, exclues le plus souvent de l’apprentissage de la lecture et de l’écriture,  de connaître les traditions culinaires familiales et régionales (et jusqu’à l’avènement des transports rapides, la cuisine reste régionale), puis par expérimentation de créer sa propre cuisine, de savoir modifier les quantités. Cela permettait aussi d’acquérir des comportements d’achats, des connaitre les meilleurs endroits où acheter bon et économique.
Du Moyen Age au 20ème siècle, le monde rural évoluera peu, contrairement à celui des villes qui verra l’évolution du rôle des cuisinières

 

 


Mots-clés : Technorati

le 16.02.06 à 16:37 dans Autour de la nourriture
- Commenter -

Partagez cet article


Mon livre

L'histoire des légumes, des potagers, du néolithique à nos jours en passant par les abbayes. Plus une cinquantaine de recettes de Michel Portos, cuisinier de l'année 2012 GaultMillau, avec les accords vins de Patrick Chazallet. De très belles photos d'Anne Lanta, une préface de Christian Coulon pour la beauté de l'ouvrage. alt : Widget Notice Mollat Analyse sur un ton léger des rapports des femmes au vin de l'Antiquité à nos jours, les interdits, les tabous, les transgressions, se ponctuant par quelques portraits de femmes du vin contemporaines. alt : Widget Notice Mollat

Tous les articles publiés

Parcourir la liste complète

Annonces

Inscrivez-vous à ma lettre d'informations

Inscription désinscription

J'en ai parlé

Archives par mois

Abonnez-vous

ABONNEZ VOUS SUR