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Boire et Manger, quelle histoire !
Le blog d'une historienne de l'alimentation

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Traditions de Noël

La fête de Noël est nimbée d’une atmosphère particulière et un peu magique, empreinte de mystères, de secrets, d’attente mais pour laquelle d’immuables traditions restent importantes. Oublions pour un instant cette consommation « ad nauseum » que lui confère notre civilisations mercantile et matérialiste pour revenir à sa signification première.  Ce n’est pas innocemment que l’église catholique, à ses débuts, a choisi cette date pour célébrer la naissance du Fils de Dieu, annoncée depuis si longtemps. Cette naissance pour les croyants c’était l’espérance enfin réalisée, le renouveau, une lumière qui s’allumait. Il n’y avait donc pas de jour plus indiqué pour célébrer cette naissance que de reprendre celle du solstice d’hiver, célébré par la plupart des peuples de l’hémisphère nord comme fête de la lumière. Ce  jour-là marque le retour vers la lumière : les nuits commencent peu à peu à raccourcir et les jours à rallonger. Les peuples les plus imprégnés de cette tradition de célébration de la lumière sont ceux des pays nordiques, plongés alors dans une profonde nuit. La fête de sainte Luce de Syracuse le 13 décembre est comme un prémices. Luce, celle qui brille, qui resplendit. Ce jour-là, les jeunes filles scandinaves, habillées de banc, ceignent leur front d’une couronne de lumière comme le raconte si bien Selma Lagerlöf dans « La légende de la fête de sainte Luce » :

 « Le 13 décembre, tôt le matin, lorsque froid et obscurité régnaient sur le pays de Vârmland, jusque du temps de mon enfance encore, la sainte Luce de Syracuse faisait son entrée dans tous les foyers disséminés des montagnes de Norvège au cours du Gullsprang. Elle portait toujours, en tout cas aux yeux des petits enfants, un habit blanc de lumière d’étoile, elle portait sur les cheveux une couronne verte avec des fleurs de lumière en flammes, et elle réveillait toujours ceux qui dormaient avec une boisson chaude et parfumée versée de son aiguière en cuivre. Jamais à cette époque-là je n’eus vision plus merveilleuse que lorsque la porte s’ouvrait et qu’elle entrait dans l’obscurité de la chambre. Et je voudrais faire le vœu que jamais elle ne cesse de se montrer dans les fermes du Värmland. Car elle est la lumière qui dompte les ténèbres, elle est la légende qui triomphe de l’oubli, elle est la chaleur du corps qui rend des régions glacées attirantes et ensoleillées au beau milieu de rude hiver. »

 

 Chez nous, la tradition perdure dans l’Est avec Christkindel, la dame de Noël qui apporte les cadeaux aux enfants. Et aussi lorsque nous allumons chaque dimanche une bougie de la couronne de l’Avent qui resplendira de lumière pour Noël. Elle est le symbole de l’espoir et de l’attente. Cet embrasement de lumière est symbolisé aussi par les petites bougies qui décorèrent autrefois le sapin de Noël, selon une tradition qui vient des pays germaniques: au 16ème, le sapin, installé dans les églises, représentait l’arbre du Paradis, il était décoré de pommes désignant les fruits de la Tentation, d’hosties figurant les fruits de la rédemption et de fleurs en papier. Passé dans la sphère familiale, sa décoration a perdu son caractère religieux pour n’être que strictement décoratif.   

L’autre tradition incontournable que nous avons transformée en dessert est la bûche de Noël. Elle remonte très lin dans le temps, une bûche de bois brûlait cette nuit-là dans la cheminée afin de s’assurer la protection des esprits domestiques. Puis, on continua de l’allumer avant de partir à la messe de minuit, elle protégeait et réchauffait la maison en attendant le retour des habitants du lieu. On gardait les restes de cette bûche à laquelle le maître de maison rallumait l’année suivante la nouvelle bûche. La grande tradition chrétienne est celle de la crèche de Noël. Commémoration de la naissance du divin enfant, les crèches vivantes de l’époque médiévale des messes de minuit qui perdurent en Provence, et particulièrement aux Baux de Provence et en Alsace. Les traditions de Noël restent très fortes dans ces deux régions, mais partout ailleurs la veillée  de Noël était l’occasion de chants et de contes prenant la forme de dialogues, appelés pastorales qui invitaient  au partage, au pardon, à l’accueil des autres et donc de cet enfant Jésus. La Pastorale des Santons de Provence est devenue célèbre et raconte avec beaucoup d’humour et de tendresse cette nuit de Noël. Beaucoup d’autres régions connaissent des pastorales : chants et poésies qui se sont développées à la renaissance parallèlement au à celui du chant polyphonique. Les figurines représentant les personnages de la crèche furent aussi créées inspirées des écrits et des tableaux et se renforcèrent après la Réforme. Longtemps cantonnées dans les églises, les crèches de santons s’installèrent chez les particuliers après la Révolution qui les chassa des églises.  

 

 

 Le retour à la maison, après la messe de minuit était très attendu par les enfants. Jusqu’au 16ème siècle, seuls les enfants recevaient des cadeaux. La tradition des jouets le matin de Noël est beaucoup plus récente.  Dans l’est de la France, en Belgique, aux Pays-Bas et en Allemagne, la Saint Nicolas est un grand évènement. Saint Nicolas, protecteur des enfants selon la légende, passait dans les maisons, offrir aux enfants sages des friandises : pommes, oranges, fruits secs, petits gâteaux et bonbons. Plus tard, on lui adjoint un père Fouettard qui punissait les garnements. Après la Réforme du 16ème siècle, la fête de Saint Nicolas, le 6 décembre,  reste importante dans les pays protestants et celle de Noël, le 25 devient la fête des catholiques. La tradition des offrandes est gardée : les enfants sont gâtés en souvenir des présents offerts à l’enfant Jésus. Le père Noël est une invention récente qui nous vient des Etats-Unis. Au 19ème siècle, on créa un avatar de santa Claus qui avait traversé l’Atlantique avec les émigrants européens. On lui ôta sa mitre et sa crosse pour un bonnet et un fouet, sa mule fut remplacée par des rennes et un traineau. C’est un brave bonhomme qui récompense tous les enfants, sages ou non, père Fouettard disparait. Les friandises sont remplacées par des jouets et les adultes finissent aussi par recevoir des cadeaux. Au sud de l’Europe c’est à l’Epiphanie que l’on donnait et recevait des cadeaux, en souvenir de ceux des rois mages, les seuls qui, selon les Evangiles, offrirent des cadeaux au divin enfant. 

 

 

 


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le 19.12.06 à 18:32 dans Nourriture et littérature
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