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Boire et Manger, quelle histoire !
Le blog d'une historienne de l'alimentation

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Tavernes

 

Les tavernes étaient nombreuses, moutiers du diable d'après certains mais très contrôlées et surveillées à la fois par la maréchaussée et les autorités.

La loi et la vente du vin dans les tavernes

Très vite, les souverains se montrent soucieux de la bonne tenue des tavernes et cabarets et par des ordonnances légifèrent en la matière. Dès 1256, sous Saint Louis, un règlement, plusieurs fois reprit ordonne " aux marchands de vin, cabaretiers et taverniers… de ne recevoir chez eux que les passants ou étrangers, et défendu d'y souffrir les habitants ou domiciliés des villes, bourgs ou villages où ils sont établis, sauf à vendre du vin à pot pour emporter".

Cette mesure, fruit d'observations et de réflexions, tirait la leçon que l'homme est moins porté aux excès de boisson dans les lieux où il voyage qu'en ceux où il habite. Cela laissait aux taverniers, cabaretiers et autres hôteliers toute latitude pour profiter de la clientèle bien payante des étrangers.

Les fautes majeures pour lesquelles peuvent être puni ces débitants de vin sont mis en garde sont

-          tenir maison ouverte à l'heure du service divin,

-          tolérer les jeux de hasard et les blasphèmes,

-          donner asile aux vagabonds, larrons et gens mal famés,

-          servir des vins souillés ou mêlés.
    

 

A Bordeaux, des lois strictes réglementaient le métier de taverniers

De 75 tavernes que comptait la ville au début du moyen-âge, on en comptait 626 à la fin du XVIIe siècle.

Pour être taverniers, il fallait seulement répondre aux conditions suivantes:

-          justifier d'une bonne conduite

-          n'avoir pas de maladies contagieuses

-          payer annuellement 20 sols bordelais à la Ville.

Ils sont officiellement désignés comme « officiers de la ville destinés pour mesurer le vin de ceux qui débitent en taverne à pot ou à pinte. Ils crient le dit vin par la ville, le percent et sont assidus pour le tirer et le vendre à tous survenants et ont leurs droits et statuts qu'ils sont tenus d'observer. »

Ils ne peuvent:

-          vendre des vins prohibés

-          mêler vins vieux et vin jeunes

-          ajouter de l'eau, ni autre substance

-          commencer un tonneau avant d'avoir fini un tonneau entamé.

-          Tenir et souffrir aucun jeu de cartes, ni gens blasphémateurs, querelleurs et suspects vagabonds

-          Recevoir des gens mariés qui délaissent femmes, enfants et famille en voie de mendier

-          Tenir taverne après la cloche de la retraite sonnée avec gens attablés.

Chaque année ils renouvelaient le « Serment des taverniers », et juraient ainsi

-          D'obéir au maire, sous-maire et jurats

-          De ne rien faire de préjudiciable aux intérêts de la ville

-          De ne prendre d'autres vins que ceux des bourgeois, tant qu'il en restera

-          De ne vendre, pendant toute l'année, que les vins des bourgeois et habitants de la ville

-          De ne pas s'établir de trois jours auprès des bourgs qui commencent à vendre leur vin en taverne

-          De fournir tout ce qu'il faut aux propriétaires pour vendre leur vin et leur rendre autant de francs par tonneau que le carton de vin se vendra de denier

-          De s'efforcer de vendre le mieux possible les vins de Bordeaux

-          De na tenir que de bonnes marchandises

-          De n'exiger, pour salaire, que 15 ou 20 sous par tonneau selon la qualité des vins

-          De faire bonne mesure tant aux vendeurs qu'aux acheteurs

En cas d’infraction, ils étaient  mis au ban et bannis de la ville.

 

Des privilèges financiers

La grande ordonnance royale de 1680 sur les aides précise que les gens qui pratiquent cette vente privilégiée en leurs maisons ou chez des taverniers agissant en leur nom sont tenus de produire " un certificat signé d'eux, contenant le dénombrement par tenants et aboutissants des vignes dont ils sont propriétaires et la quantité de vin qu'ils y ont recueilli avec déclaration qu'ils font façonner à leurs dépens." En effet, cette pratique était exempte des impôts "du quart et huitième" payé par les professionnels.

En 1698, Louis XII déclare: " si ces propriétaires ont reçu de nos prédécesseurs et de nous, pour la vente des vins de leur cru, aucuns privilèges et exemptions, ce n'a point été fait ni entendu pour faire vente en assiette et taverne, mais simplement en détail, parce que faire taverne est vil état et métier, et n'est loisible et n'appartient de ce faire à gens d'église, nobles, officiers et autres privilégiés."

Quiconque serait convaincu d'avoir vendu son vin de cette façon serait déchu de son privilège et astreint à payer, comme les taverniers et autres commerçants de cette catégorie, le droit de quart et huitième.

Ce privilège fut maintenu par des déclarations royales jusqu'à l'édit de septembre 1789 qui abolit les privilèges fiscaux dont bénéficiaient les propriétaires de vignes avaient joui jusqu'alors pour la vente des vins de leur cru.

Quasiment jusqu'à la fin de l'Ancien Régime, le tavernier fut soit un propriétaire, soit l'employé d'un gros. Les grands seigneurs laïcs ou religieux, les couvents voire même le roi possédaient des tavernes qui "ne pouvant garder de caractère aristocratique que si elle n'avait rien d'un commerce lucratif, restait un moyen d'écouler le surplus de vin récolté par le vendeur sur ses propres terres". La taverne était, à ce titre, exempte des impôts frappant les cabarets.

 
 

Mots-clés : Technorati

le 31.05.10 à 09:00 dans Vins
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