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Boire et Manger, quelle histoire !
Le blog d'une historienne de l'alimentation

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Les champignons

Voici venue la saison des champignons !On met ses souliers imperméables, un gros pull, on prend un panier en osier, un bon couteau et on part en famille les ramasser en forêt.On revient souvent bredouille, mais on a respiré les senteurs de la forêt, les feuilles mouillées, la mousse, on a les joues roses et de belles feuilles mortes que les enfants apporteront à leurs maîtresses pour faire un herbier !


La cueillette fut, dès les civilisations primitives, une activité primordiale et nécessaire à la survie. en tant qu'apport principal de nourriture, puis au fur et à mesure que l'agriculture se développe comme appoint supplémentaire qui apportait de la variété. Les champignons faisaient partie des produits ramassés et cueillis.
 


Les plus dangereux furent employés comme remèdes ou lors de rites religieux à cause de leurs pouvoirs hallucinatoires. Un peu plus tard, les premières recettes de cuisine connues, à Babylone, expliquent comment rendre consommables des champignons toxiques en les ébouillantant. Lors des banquets ils agrémentent le repas et apportent un supplément agréable aux viandes en ragoût.



Les grecs en étaient très friands et leur connaissance des champignons comestibles et vénéneux est établie par le fait que deux médecins grecs, dont le célèbre Dioscoride, donnent des recettes de culture, de cuisine et même de remèdes en cas d'indigestion. Pline, dans son Histoire Naturelle, donne une très complète classification des champignons. Les romains utilisaient les produits de la cueillette en cas de disette mais seulement les asperges sauvages et les champignons, considérés comme des légumes de luxe, qui peuvent, à ce titre, entrer dans l'alimentation humaine. Les champignons dont il fallait se méfier étaient classés dans la catégorie des produits sauvages à consommer avec prudence. Longtemps de ce fait, mis à part les truffes, ils furent relégués pour les populations campagnardes qui y trouvaient un apport non négligeable de délicieuses saveurs et de sels minéraux, vitamines et protéines jusqu'au début du XVIIème.



A partir de cette époque, on va se passionner pour les truffes, mais aussi pour les mousserons, les morilles et tous les champignons sauvages et de couche qui connurent un essor foudroyant dans l'alimentation. Olivier de Serres dans son "Théâtre d'Agriculture et Ménage des Champs" donne des conseils pour la culture et le séchage, une des méthodes de conservation qui garde le mieux le parfum des champignons. D'ailleurs, Louis XIII, fou de champignons, en mettait à sécher dans sa chambre à coucher. Fut édité aussi un Corpus des champignons, véritable atlas, permettant au cueilleur profane de ne pas empoisonner sa famille avec sa récolte.



Dans l'Antiquité, ce fruit, car le champignon est un fruit : un carpospore, était considéré comme un don miraculeux des dieux, poussant spontanément après la pluie. On avait donc compris que les champignons naissaient de la pourriture de la même manière que la phénix renaît de ses cendres. On plaçait donc du compost ou du fumier mêlé d'écorce de peuplier pilé, le plus souvent au pied ou entre les racines des arbres, là où on les trouvait naturellement dans la nature. En effet, les racines de certains arbres et les champignons vivent en complète symbiose. Le mycélium qui est la partie végétative du champignon, forme une sorte de gaine autour des radicelles de l'arbre, lui apportant de l'eau, des sels minéraux, de l'azote et du phosphore qui protègent les racines et favorisent la croissance de l'arbre. En revanche l'arbre fournit aux champignons, organismes non chlorophylliens, des sucres dont ils ont besoin et qu'ils ne peuvent pas produire.



Les champignons de couche existent depuis très longtemps. En Chine et au Japon, la culture du shiitake remonte à 2000 ans. Les Egyptiens cultivaient l'Agaricus hortensis dit champignons de Paris car dès 1670 cette culture fut pratiquée à Paris.



Pourquoi champignons de couche? N'ayant besoin que d'humus, d'ombre et de terreau de bois et de végétaux pourrissant dans l'obscurité. On place du mycélium sur des couches de terreau mélangé à du fumier de cheval. Si vous possédez une cave humide, vous pouvez tenter l'expérience, cependant pensez à désodoriser le fumier ! En France on trouve des champignonnières dans les carrières de la région parisienne, les collines du Val de Marne et du Val d'Oise, les abris troglodytes du Maine et Loire et les carrières de Gironde dans lesquelles poussent champignons de Paris, pleurotes, chanterelles et shiitake.



Mais rien ne vaut d'aller les ramasser soi-même et donc rendez-vous au prochain épisode.

 

Auparavant un poème de Nicole Laurent-Catrice, Table et Retable


Champignon


Tu as pignon sur champ

ou sur souche.

Glabre ou chevelu

livide ou roux

beau, laid, blème

ou rosé si tu es élevé en couche

chapeau !

Et c'est le pied

(pied bleu ou pied de mouton)

quand tu gigotes dans l'ail et le beurre

avant d'aller fondre dans nos bouches.

Mais pour le cueilleur qui se trompe

gare à la trompette

du jugement.


Mots-clés : Technorati

le 07.11.08 à 09:00 dans Histoire des aliments
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Commentaires

Bonjour, Je vis sur le bassin d'arcachon, actuellement dans ma cueillètte il y a le lactaire délicieux que je nomme Catalan, et quelques cèpes de bonnes tailles. Je vous rejoins dans votre article suivant quant aux conseils que vous donnez sur la cueillète, c'est un excellent article ! au plaisir de vous lire, bon dimanche

Agnès - 08.11.08 à 19:23 - # - Répondre -

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