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Boire et Manger, quelle histoire !
Le blog d'une historienne de l'alimentation

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Le pain aujourd'hui



Le progrès ne fait pas tout.

Aux 19ème et 20ème siècles, les progrès techniques s’accélèrent. Les pétrins mécaniques, les pétrins à vitesse accélérée (1956), les levures rapides, les fours automatiques, les sélections de blé et les améliorations des techniques de meunerie et de blutage, tout devrait concourir à faire un pain toujours meilleur. Or il n’en est rien et différents problèmes sont apparus. Le pain ne manque plus, il manque simplement de goût et de consistance.
Le premier problème vient de la standardisation des farines due à un manque de diversité des blés provoquée elle-même par la sélection et la création des blés hybrides, voire OGM. A cela s‘ajoute les pétrissages accélérés, les triturations, les forçages de la pâte, les congélations et réchauffement des pâtons et des pains qui donnent des pains de mauvaise qualité nutritionnelle, sans goût, ni consistance et qui sont immangeables au bout de 2 heures.
Le deuxième problème vient d’un excès de blutage des farines, quand autrefois, on ne rêvait que de pain  blanc, le meilleur de tous,  nous adoptons actuellement une position inverse.  Les meules des moulins produisent des farines de plus en plus blanches dont les types sont définis par le taux d’extraction, c’est-à-dire la quantité de farine obtenue par rapport au blé à moudre. Par exemple, si 100 gr de blé à moudre donne 75 gr de farine on dit que la farine, blutée à 75% est de type 55, c’est d’ailleurs la farine la plus utilisée. Il existe aussi une farine de type 45 tamisée des dizaines de fois, très blanche et très fine. Seulement plus la farine est blutée, plus elle est blanche, moindre est sa qualité nutritionnelle, elle a perdu ses fibres, ses protéines, ses vitamines et ses minéraux. Par comparaison, la farine pour pain complet est blutée à 90-95%, celle pour le pain bis à 85-90% et celle pour le pain intégral à 98%.
Le troisième problème provient des pétrissages accélérés qui liés aux carences provoquées par un blutage intensif exige d’introduire des « améliorants » dans la pâte. Il s’agit de la farine de fève autorisée jusqu’à 2% qui en accélérant l’oxydation provoque le blanchiment de la mie, de la farine de malt de blé ou d’orge (0,3%) qui améliore la fermentation des farines pauvres en sucre, l’acide ascorbique (0,003%) qui augmente la force de la pâte.
Tous ces procédés sont employés massivement dans la boulangerie industrielle où la farine est blanchie artificiellement, où des conservateurs E280, 281 et 282 sont ajoutés pour lutter contre les moisissures  et contre l’appauvrissement provoqué par l’élimination du gluten, des protéines et du germe de blé avec le son.
Et en France il existe 200 entreprises de panification industrielle, dont la maison Jacquet est le leader avec 35% du marché du pain de mie. Cela représente 30% des pains consommés, 350 terminaux de cuisson et 2500 baguettes/l’heure.

 

 

A la recherche du pain perdu
La grande difficulté est de trouver du bon pain, il fut même une époque récente où cela tenait de la gageure. Si autrefois, la boulangerie était l’âme du village et le lieu où, obligatoirement, on allait tous les jours chercher son pain, ce n’est plus forcément le cas. D’abord parce que les vrais et bons boulangers sont rares et qu’on ne sait pas très bien  reconnaitre une véritable boulangerie d’un terminal de cuisson qui délivre dans la rue des arômes artificiels de pain et de brioche pour attirer le chaland. Soyons vigilants.
L’état avait statué par un premier décret sur l’appellation de boulanger en 1997, mais le Syndicat National des industries de la boulangerie et de la pâtisserie avait fait annuler ce décret par le Conseil d’Etat.
Cependant, après une proposition de loi à l’assemblée nationale, une loi a été votée statuant sur les conditions autorisant à poser l’enseigne de boulanger sur sa devanture

Loi n° 98-405 du 29 mai 1998 déterminant les conditions juridiques de l'exercice d'artisan boulanger et de l'appelation de boulanger et enseigne de boulangerie
 

Art. L. 121-80. - Ne peuvent utiliser l’appellation de “boulanger” et l’enseigne commerciale de “boulangerie” ou une dénomination susceptible de porter à confusion, sur le lieu de vente du pain au consommateur final ou dans des publicités à l’exclusion des documents commerciaux à usage strictement professionnel, les professionnels qui n’assurent pas eux-mêmes, à partir de matières premières choisies, le pétrissage de la pâte, sa fermentation et sa mise en forme ainsi que la cuisson du pain sur le lieu de vente au consommateur final ; les produits ne peuvent à aucun stade de la production ou de la vente être surgelés ou congelés.. - Ne peuvent utiliser l’appellation de “boulanger” et l’enseigne commerciale de “boulangerie” ou une dénomination susceptible de porter à confusion, sur le lieu de vente du pain au consommateur final ou dans des publicités à l’exclusion des documents commerciaux à usage strictement professionnel, les professionnels qui n’assurent pas eux-mêmes, à partir de matières premières choisies, le pétrissage de la pâte, sa fermentation et sa mise en forme ainsi que la cuisson du pain sur le lieu de vente au consommateur final ; les produits ne peuvent à aucun stade de la production ou de la vente être surgelés ou congelés.

Art. L. 121-81. - Cette dénomination peut également être utilisée lorsque le pain est vendu de façon itinérante par le professionnel, ou sous sa responsabilité, qui remplit les conditions précisées à l’article L. 121-80.
 . - Ne peuvent utiliser l’appellation de “boulanger” et l’enseigne commerciale de “boulangerie” ou une dénomination susceptible de porter à confusion, sur le lieu de vente du pain au consommateur final ou dans des publicités à l’exclusion des documents commerciaux à usage strictement professionnel, les professionnels qui n’assurent pas eux-mêmes, à partir de matières premières choisies, le pétrissage de la pâte, sa fermentation et sa mise en forme ainsi que la cuisson du pain sur le lieu de vente au consommateur final ; les produits ne peuvent à aucun stade de la production ou de la vente être surgelés ou congelés.. - Cette dénomination peut également être utilisée lorsque le pain est vendu de façon itinérante par le professionnel, ou sous sa responsabilité, qui remplit les conditions précisées à l’article L. 121-80.

 Voila qui clarifie les choses mais ne délivre pas forcément le talent et la volonté de faire du bon pain. Demandez à votre boulanger quel type de farine il utilise, testez si le pain rassit plus ou moins vite, c’est un signe qui ne trompe pas, si la mie est bien levée et goûtée, si la croûte est bien croustillante. On reconnait le bon pain très vite et on recommence à  en manger.
Le niveau de vie ayant progressé la consommation de viande avait supplanté celle du pain. Car le pain a été voué aux gémonies par les diététiciens et nutritionnistes à une époque, accusé de faire grossir. Comme il était de moins en moins bon, la consommation de pain était passée de 1900 à 1987 d’une livre à 164 gr/jour. Face à cette désaffectation, certains minotiers réagirent en travaillant des blés de qualité et en raffinant moins les farines. Des boulangers, à l’instar des Poîlane, Ganachaud ou Moisan pour ne citer que les plus célèbres, se mirent à travailler comme leurs ainés avec des farines façonnées sur meule de pierre, des levains naturels, des fermentations au levain naturel ou sur poolish. Ils ont pris le temps de bien faire du pain. Ils ont vendu des pains au goût affiné, riches en vitamines et sels minéraux, des baguettes dorées, à la croûte croustillante, à la mie crémeuse, souple et aérée, ou des miches à la mie un peu bise, au goût légèrement aigrelet, des pains qui se conservaient.  Du pain qui contient des glucides, de l’amidon et du sucre, des protides, peu de lipides, des minéraux, du calcium, du phosphore et du fer et des vitamines B1, B2, PP et E. Que du bon finalement.

 


Mots-clés : Technorati

le 10.03.08 à 15:56 dans Histoire des aliments
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