S'identifier - S'inscrire - Contact

Boire et Manger, quelle histoire !
Le blog d'une historienne de l'alimentation

Recherche

 

La bataille des vins

 Coucou! Revoila les vins de Champagne. Nous les avions laissés avant qu'ils ne soient les superbes vins que nous connaissons. Il y a encore une étape à franchir pour que nous soyons en présence de cette liqueur dorée et pétillante. Cette étape dura un siècle: le XVIIème siècle.

 

Comment les vins de Champagne surpassèrent les vins de Bourgogne

Ce n’est qu’au XVIème siècle que l’appellation « Vins de Champagne » apparut. Vins de Champagne qui étaient en concurrence à Paris avec les vins de Bourgogne. La renommée des vins de Champagne était due à l’engouement général pour les vins de Beaune de la part des amateurs ces vins qui descendant des régions septentrionales pour aller acheter leurs vins passaient par la Champagne et s’approvisionnaient en vins d’Ay, des montagnes d’Epernay, de Reims et des Vertus. Un vin de pinot à grains noirs moins riches en alcool et en couleur que ceux de Beaune en raison du climat et des étés moins chauds. Malgré ces défauts le vin d’Ay était très apprécié et un médecin écrivait même en 1588 : « le vin d’Aï est de déliée et subtile matière, plaisant à boire, de facile digestion et de prompte distribution, qui fait que les roys et princes en font souvent leur breuvage ordinaire. »

Un puissant lobbying à la cour de Louis XIV
Quelques grands propriétaires de vignobles tels les Brûlart ou les moines bénédictins de l’abbaye d’Hautvillers au XVI et XVIIèmes siècles les vins champenois se sont perfectionnés et en 1600, la Montagne de Reims produisait des vins de bonne tenue et considérés parmi les meilleurs du royaume, des concurrents pour les vins bourguignons. Jusqu’à la fin du règne de Louis XIV, la lutte fut ardente entre ces deux régions viticoles pour obtenir la suprématie. Les arbitrages des médecins penchant tantôt pour le vin de Beaune tantôt pour celui de champagne se termina finalement par la victoire du champagne qui avait acquis des qualités certaines et bénéficiait de ce que nous appellerions maintenant un puissant lobbying à la cour, outre la maréchale d’Estrées, bien en vue à la cour, qui aimait à boire du Sillery, appelé le vin de la Maréchale, puisqu’en bonne ambassadrice, elle l’avait fait entrer à la table royale, il y eut l’Ordre des Coteaux auquel appartenait L.R Brûlart, marquis de Sillery, vicomte de Puisieux, seigneur de Verzenay et Ludes dont on comprend à l’énoncé de ces lieux, combien le succès du vin de Champagne à la cour lui tenait à cœur. Le succès vint aussi de Londres où St Evremont, banni de la cour de France, s’était réfugié. Grand amateur  de vins d’Ay, d’Avenay et de Hautvillers, il convertit les aristocrates de l’entourage du roi anglais à apprécier et adopter ses vins préférés, ceux de la Rivière, précédemment nommés et ceux de la Montagne : Taissy, Sillery et Verzenay.


Dom Pérignon


Et des ecclesiastiques novateurs

A côté des aristocrates propriétaires de vignobles, les ecclésiastiques jouèrent un grand rôle ; outre les abbés Oudart et Ruinart, deux personnalités ont contribué à l’amélioration des vins de Champagne au XVIIème siècle : l’abbé Godinot et Dom Pérignon. Le second à qui l’on prête à tort  « l’invention » de l’effervescence, fut cellérier d’Hautvillers de 1668 à 1715. Il travailla toute sa vie à améliorer les vins en pratiquant une sélection de plants de vignes, en améliorant la taille et perfectionnant la vinification. Mais on lui doit surtout le tri des raisins après la cueillette et l’assemblage de vins.
Quelques années après la mort de Dom Pérignon, parut en 1718 un ouvrage intitulé « Manière de cultiver la vigne et de faire le vin en Champagne » qui explique comment faire des vins de qualité. Ouvrage que l’on doit à la plume de l’abbé Godinot, chanoine de Reims,  qui bouleversa complètement la manière de produire les vins en Champagne.  Pourquoi ? Simplement parce que l’abbé Godinot, tout comme Dom Pérignon, préconisait de cueillir les raisins tôt le matin et de les porter délicatement et promptement au pressoir. Oui au pressoir, les raisins ne doivent plus être foulés pour garder l’arôme des fruits. Une presse douce va donner un jus rouge pâle qui devenait gris voire même blanc après la fermentation : la spécificité de la vinification champenoise fut trouvée fortuitement mais devint la règle. « C’est un principe certain que, quand les raisins sont coupés, plus tôt ils sont pressurés, plus le vin est blanc et délicat, plus la liqueur demeure dans le marc, plus elle rougit. ».


Chanoine Jean Godinot

Le rôle du flacon
Cette découverte enchanta la clientèle des amateurs de champagne. D’autant que ces vins gris, dits œil de perdrix, se conservaient très bien et encore mieux quand on leur faisait quitter les futailles pour les conserver dans des flacons de verre bouchés par des chevilles en bois entourés de filasse.

Dom Ruinart remarqua la fraicheur et le degré idéal d’hydrométrie des caves creusées dans la craie, dorénavant les bouteilles furent conservées dans les caves crayeuses. Les vignerons optèrent pour des plantations de pinot à raisins blancs, de chardonnay et de fromenteau c’est ainsi que naquit la Côte des Blancs autour d’Avize.

Pour faire face à la demande de flacons de verre, des verreries s’installèrent à St Gobain et en 1735, une ordonnance royale autorisa le transport du vin en bouteille et fixa la forme, la contenance et le poids des bouteilles, la longueur des bouchons : 38 mm et la manière de les fixer au moyen d’un ficelle au col de la bouteille.

Une véritable révolution qualitative avait eu lieu pour la plus grande gloire du vin de Champagne.


Mots-clés : Technorati, Technorati

le 23.05.12 à 00:10 dans Vins
- Commenter -

Partagez cet article


Mon livre

L'histoire des légumes, des potagers, du néolithique à nos jours en passant par les abbayes. Plus une cinquantaine de recettes de Michel Portos, cuisinier de l'année 2012 GaultMillau, avec les accords vins de Patrick Chazallet. De très belles photos d'Anne Lanta, une préface de Christian Coulon pour la beauté de l'ouvrage. alt : Widget Notice Mollat Analyse sur un ton léger des rapports des femmes au vin de l'Antiquité à nos jours, les interdits, les tabous, les transgressions, se ponctuant par quelques portraits de femmes du vin contemporaines. alt : Widget Notice Mollat

Tous les articles publiés

Parcourir la liste complète

Annonces

Inscrivez-vous à ma lettre d'informations

Inscription désinscription

J'en ai parlé

Archives par mois

Abonnez-vous

ABONNEZ VOUS SUR