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Boire et Manger, quelle histoire !
Le blog d'une historienne de l'alimentation

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De la nécessité de mâcher

             C’est un fait avéré, les préférences d’un grand nombre de mangeur vont vers des aliments mous, voire croustillants, mais les mets plus coriaces ne sont pas ou plus prisés. Par ailleurs, un certain nombre de régimes alimentaires dit amaigrissants proposent des préparations en poudre à diluer qui remplacent les repas. Il existe même des produits nutritionnels conçus pour couvrir intégralement les besoins nutritionnels humains qui peuvent servir d’alimentation unique à la place de vrais aliments. Un peu comme dans le film «  Soleil Vert » quand les habitants de la terre se nourrissaient de tablettes de couleur. Un monde où les dents et les mâchoires conçues pour nous aider à manger n’ont plus aucun rôle. Et pourtant mâcher ses aliments est tellement nécessaire à l’homme.  

 

 

Mastiquer pour plus de plaisir

Brillat-Savarin qui est le premier à avoir proposé une définition du goût de manière totalement empirique, mais qui s’est révélé assez exacte quand les connaissances scientifiques ont permis de poser une définition plus juste, écrivait dans La Physiologie du Goût : « le goût est celui de nos sens qui nous met en relation avec les corps sapides, au moyen de la sensation qu’ils causent dans l’organe destiné à les apprécier […]  Dans ce choix le goût est puissamment aidé par l’odorat. »

En effet, le goût est l’ensemble des perceptions que l’on ressent quand on met un aliment en bouche. On ressent le goût par les bourgeons du goût situés sur les papilles gustatives disséminées sur la langue mais aussi sur les muqueuses de l’épiglotte et du pharynx. Lorsque l’on porte un aliment en bouche, c’est d’abord le sens du toucher qui agit car les lèvres, la langue, les muqueuses buccales vont déchiffrer un grand nombre de stimuli qui contribuent à définir le goût d’un aliment mais qui ne sont en aucun cas une saveur, puisqu’ils font appel à d’autres sphères sensorielles. Les principaux stimuli sont :

  1. -         Les stimuli tactiles déterminent la texture et la température des aliments
  2. -         Les stimuli chimico-physiques font ressentir l’astringence, l’alcalinité, etc.
  3. -         Les stimuli « d’arrière-bouche », qui sont une forme de continuum.
  4. -         Les stimuli dus à la sensibilité olfactive rétro-nasale liés aux odeurs et arômes en bouche

Souvent l’expression  « le goût de… » désigne à la fois le goût et l’arôme. En réalité,  les arômes sont des odeurs en bouche qui contribuent aux sensations gustatives. Les intensités de ces arômes dépendent de divers facteurs tels que la manducation, la température en bouche et la température des aliments : un même aliment consommé froid ou chaud dégage des arômes différents. Plus on mâche un aliment, plus il se réchauffe. Si l’on mange un aliment froid, il va lentement se réchauffer dans la bouche au fur et à mesure de la mastication. Son goût va donc évoluer puisque la température en bouche et celle des aliments réchauffés par la manducation vont se modifier. Avec un aliment chaud, la manducation va  exacerber les arômes. Donc plus nous mâchons, plus nous libérons d’arômes qui sont également perçus grâce aux récepteurs olfactifs captant l’air qui passe par les narines par le biais des poils du bulbe olfactif qui sont des détecteurs d’odeurs et surtout grâce à l’olfaction rétro-nasale appelée aussi rétro-olfaction. L’arrivée d’air par le nez et par la bouche permet de mieux ressentir les arômes. Les arômes libérés provoquent du plaisir, de la satisfaction qui procèdent du plaisir de manger. Tout le temps de la mastication et de la déglutition, nous éprouvons un plaisir qui va en augmentant, et plus nous mastiquons, plus le plaisir dure.

Et un plaisir qui durera d’autant plus qu’une bonne manducation facilite ensuite la digestion.

 

Mastiquer pour bien digérer.

Nous possédons dans la bouche deux muscles remarquables. Celui de la mâchoire est le plus puissant du corps humain et celui de la langue le plus agile, le premier exerce une très forte pression sur les dents dont l’émail est le matériau le plus dur que fabrique le corps. Donc la nourriture que nous ingurgitons et que la langue va chercher dans tous les recoins de la bouche va être broyée par les dents lorsque nous mâchons. Quand les aliments sont suffisamment mastiqués et broyés, il forme une sorte de bouillie appelée « bol alimentaire ». Ce bol alimentaire va être avalé et envoyer dans le pharynx, puis dans l’œsophage. Tous les muscles de l‘œsophage se contractent pour faire descendre le bol alimentaire dans l’estomac qui va le brasser et le moudre en minuscules particules qui vont partir dans le pylore. De là, ce magma passe dans l’intestin grêle où va se faire la digestion proprement dite et l’extraction de tous les nutriments. La bouillie prend un nom : le chyme qui est de nouveau broyé et malaxé. C’est alors que les nutriments traversent les parois de l’intestin pour passer dans le sang et les résidus sont balayés vers le gros intestin qui est chargé de l’évacuation des résidus.

Une fois cette leçon de SVT revue, nous pouvons comprendre pourquoi mâcher est si important. Si la nourriture n’est pas mâchée, le travail de la digestion est plus compliqué et plus long. On risque premièrement de s’étouffer en avalant une nourriture insuffisamment broyée qui ensuite aura des difficultés à descendre dans l’œsophage et une impression de lourdeur sera ressenti par l’individu goulu qui mâche et avale trop vite. Si les dents ne son pas activées régulièrement, notre dentition se dégrade.

 

Mâchons, mâchons… vous avez compris la nécessité de mâcher pour se porter mieux et ressentir davantage de plaisir gustatif. Activons donc nos dents et nos mâchoires quand nous mangeons, elles sont faites pour cela et, cerise sur le gâteau, vous fortifierez les muscles masticateurs qui permettent de conserver un ovale parfait du visage et les empêcheront de subir la théorie de gravité et de garder vos joues de bébé. 


Mots-clés : Technorati

le 19.09.16 à 17:13 dans Autour de la nourriture
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Commentaires

Les fourmis montent à l'arbre

Cet article est parfaitement illustré par la dégustation du plat sichuanais dont le nom est en titre et dont le premier contact est acidulé, assez sucré même. Puis à la mastication il devient de plus en plus épicé, à tel point qu'il faut une nouvelle bouchée dont le sucre va apaiser le feu. Si ce plat était avalé tel quel, il perdrait la totalité de son intérêt. 

Patrick - 19.09.16 à 17:52 - # - Répondre -

Richard

Merci pour cet article très riche en informations.

Richard - 26.02.18 à 15:48 - # - Répondre -

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